Le plaignant PFAS intente l'un des plus grands recours collectifs de l'histoire
Vous avez bien lu : un plaignant dans une affaire PFAS en instance devant la cour fédérale de l'Ohio a récemment intenté « l'un des plus grands recours collectifs de l'histoire », selon la Cour d'appel du sixième circuit, qui examine actuellement un appel déposé dans l'affaire In re E.I. DuPont de Nemours & Co. C-8 Pers. Inj. Litig.1Les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS), surnommées « produits chimiques éternels » car elles ne se décomposent pas dans l'environnement, sont un groupe diversifié de nombreux produits chimiques artificiels utilisés dans des produits commerciaux et des processus industriels à travers le monde depuis les années 1940. Les PFAS font la une des journaux depuis un certain temps déjà, mais la portée prévue de cette affaire et les mesures de redressement demandées par le plaignant sont extraordinaires.
Le plaignant Kevin Hardwick a intenté un recours collectif pour préjudice corporel contre un groupe de fabricants et de distributeurs de certains types de PFAS contenant huit atomes de carbone (notamment l'acide perfluorooctanoïque ou « PFOA » et le perfluorooctanoate d'ammonium), alléguant la présence de PFAS dans son sang. Le plaignant reconnaît qu'il « n'a aucune idée » de quel défendeur (le cas échéant) l'a exposé aux PFAS.2Il affirme également « ne souffrir d'aucun problème de santé résultant de son exposition », mais affirme plutôt qu'il est confronté à un «risque de développer diverses maladies».Parmi les mesures de redressement demandées par le plaignant figure l'obligation pour les défendeurs de financer un groupe d'experts scientifiques chargé d'étudier l'exposition aux PFAS et ses implications pour la santé.
Taille du groupe proposé par le demandeur – Tous les Américains ?
Ce qui est toutefois le plus remarquable dans cette affaire, c'est la taille du groupe proposé. Le plaignant réside dans l'Ohio, mais a initialement cherché à inclure « presque tous les Américains » dans un groupe national proposé car, selon lui, les PFAS ont contaminé le sang de presque tous les Américains et causeraient des dommages à l'être humain quelle que soit la dose, ce qui crée une cohésion suffisante au sein du groupe.5Le tribunal de district a refusé de certifier un groupe national au motif qu'il manquait de points communs et a également estimé que certains États ne reconnaissaient pas les allégations d'augmentation du risque de maladie comme un préjudice indemnisable dans le cadre de demandes d'indemnisation pour négligence ou de surveillance médicale.6
Bien qu'il ait rejeté la classe nationale proposée, le tribunal de district a néanmoins certifié une classe comprenant « la quasi-totalité des 11,8 millions d'habitants de l'Ohio, ainsi que toute autre personne soumise à ses lois».7Face à une classe dont la taille restait impressionnante, les défendeurs ont obtenu gain de cause en introduisant un appel interlocutoire devant la sixième chambre d'appel contre la décision de certification de la classe. En acceptant la demande de révision interlocutoire, la Cour d'appel du sixième circuit a reconnu que même le groupe plus restreint, à l'échelle de l'État, constituait « l'un des plus grands recours collectifs de l'histoire ».8La Cour a critiqué le tribunal de district pour avoir refusé « d'appliquer une exigence de cohésion approuvée par sept cours d'appel ».9Au-delà du groupe lui-même, la Cour d'appel du sixième circuit a exprimé de sérieux doutes quant à la menace d'une « responsabilité massive » pour une mesure de surveillance médicale « mal définie » pour l'ensemble de l'État de l'Ohio.10
Bien que les parties soient encore en train de déposer leurs mémoires d'appel, il semble que la décision de certification de recours collectif rendue par le tribunal de district de l'Ohio risque d'avoir du mal à passer le cap de l'examen en appel. Cette affaire mérite toutefois d'être suivie, car elle revêt une importance plus large en tant que signe avant-coureur de ce qui va se passer dans les litiges liés aux PFAS. Elle démontre que la nature omniprésente des PFAS, tant en termes de nombre de produits chimiques que d'applications, peut constituer un terrain fertile pour des tactiques ambitieuses, agressives et novatrices dans les litiges liés aux PFAS, même pour les plaignants qui n'allèguent pas de problème de santé actuel résultant d'une exposition présumée aux PFAS.
1 2022 WL 4149090, à *10 (6e Cir. 9 septembre 2022).
2Id. à *2.
3Id.
4Id.
5Hardwick c. 3M Co., 589 F. Supp. 3d 832, 841 (S.D. Ohio 2022).
6Id. aux pages 860-861.
7 2022 WL 4149090, à *1.
8Id. à *10.
9Id.
10Id.